Il ne faut jamais penser que la finalité de l’enseignement de la géographie est la maitrise de la géographie elle-même. Au primaire on ne forme pas des géographes, on forme des citoyens ! Ainsi on enseigne la géographie car on veut que les élèves comprennent l’espace et le monde qui les entoure. Le découpage scolaire des disciplines existe pour faciliter l’organisation scolaire mais pas toujours les apprentissages. Ainsi ce n’est pas une erreur d’enseigner la géographie comme une discipline en elle-même mais c’en est une de ne l’enseigner que de cette manière.
Il faut donc faire des liens entre la géographie et les autres disciplines et il faut surtout montrer que dans la causerie du matin ou dans la préparation des fêtes de Noël à l’école il y a aussi des éléments géographiques. Si, quand on travaille différents thèmes, on informe les élèves que ce que l’on fait actuellement c’est une forme ou une autre de géographie alors ils comprendront que la géographie ce n’est pas qu’une discipline scolaire. Je trouve toujours dommage quand un élève vers la fin de son primaire m’interpelle en classe pour me dire : « Mais madame ce n’est pas de la géographie que nous faisons ! » Il faut éviter d’encarcanner nos élèves dans cette logique scolaire. Il faut leur montrer que la géographie c’est comme une paire de lunettes que l’on met pour lire le monde avec un regard particulier et que ces lunettes on peut les porter tout le temps et pas seulement quand il est écrit GÉOGRAPHIE dans notre horaire de classe !
Chantal Déry
Si la géographie et l’histoire sont présentées distinctement dans les socles, il n’en est pas ainsi dans le programme intégré, fort heureusement. Cependant, le texte reste confus, et souvent mal interprété. « Comprendre l’espace » est confiné à la géographie, « comprendre le temps » à l’histoire, « comprendre la matière » aux cours des autres sciences que la géographie, et « comprendre l’homme » à on ne sait trop qui. Je m’évertue à expliquer à mes étudiants que la géographie, tout comme les autres sciences ou l’histoire, peuvent chacune apporter leur regard pour comprendre l’espace, le temps, l’homme ou la matière. Si les enseignants partaient du réel, comme prescrit dans le PI, l’approche interdisciplinaire serait évidente.
Christine Partoune
C'est une évidence...et c'est comme tout.
Tout d'abord, parce que l'histoire, la géographie et les sciences constituent notre quotidien et le quotidien des enfants. Prendre du temps pour aborder ces disciplines en les mettant en relation, permet de mieux comprendre le monde dans lequel on vit. Cela permet des prises de conscience, des avis critiques beaucoup plus complets sur ce qui se passe autour de nous.
Au-delà des ponts faciles avec d'autres disciplines comme les mathématiques, c'est surtout la démarche à mettre en place pour appréhender notre environnement qui est intéressante.
Dominique Yernaux
Ne serait-ce pas là une question transversale à toutes les disciplines ?
L’éveil, qu’il soit géographique, historique, scientifique, artistique, n’est-il pas une magnifique porte d’entrée pour les apprentissages en langue française ou en mathématique ?
L’essence même de la géographie la place au carrefour des sciences naturelles et humaines.
A mon sens, c’est une erreur de spécialiser certains instituteurs dans une discipline de l’éveil alors que les différentes études en éducation démontrent que le cloisonnement des disciplines ne facilite pas leur apprentissage.
Il me semble plus efficient de viser l’intégration des disciplines.
Nathalie Bourdouxhe
L'éveil est sans doute le domaine qui se prête le plus aux liens interdisciplinaires de par sa nature même dès lors, il me semble intéressant de les mettre en évidences dès qu'on le peut. Toutefois, pour certains enfants parfois plus fragile, je pense qu'il ne faut pas oublier de leur permettre de bien réaliser ces liens et donc peut-être parfois, en fin d'apprentissage de bien repréciser ce qui était du domaine géographique, historique ou autre...
Je nuancerai aussi un peu ce propos au niveau des classes du cycle 2 dans lesquelles l'éveil historique est essentiellement basé sur le temps qui passe (temps surtout abordé en terme de "grandeur") mais ces liens n'en sont pour autant pas impossibles à réaliser.
David Dusoulier
La géographie est étroitement liée à d’autres compétences : le savoir structurer l’espace, l’éveil historique,… Je pense toutefois qu’il faut pouvoir viser un objectif, une compétence, lors des apprentissages réalisés avec les élèves. Néanmoins, je travaille parfois une compétence qui sera au service d’une leçon de géographie. Si l’on regarde le programme de plus près, des notions historiques ont leur place en géographie (quand on parle des interactions homme/espace). Notre programme est dit ‘intégré’ donc il est évident que la géo ne doit pas rester cloisonnée.
Marie-Pierre Deridder
En effet, l’interdisciplinarité est essentielle, elle permet aux enfants de faire des liens entre la dimension historique et la facette géographique qui sont indissociables pour appréhender le monde qui nous entoure. Pourquoi un paysage se modifie-t-il au fil du temps ?
Toutefois, dans un premier temps, cibler davantage la construction d’une seule compétence va permettre de mieux accompagner l’apprenant et d’identifier les difficultés rencontrées. L’enseignant(e) pourra alors mettre en œuvre des pratiques d’évaluation formative et de pédagogie différenciée en adéquation avec les apprentissages proposés.
De surcroit, pour le niveau maternel, travailler sur l’espace qui les entoure, sans ajouter la dimension temporelle, est déjà un sérieux défi si on le fait de façon ‘pointue’. La notion de temps n’a que peu de valeur pour ces jeunes élèves au vu de leur développement intellectuel : la ligne de temps se réduit par la force des choses à l’hier - l’aujourd’hui - le demain et comme les souvenirs de leur passé sont succincts, les enfants ne possèdent guère de base pour conceptualiser les notions de passé, présent et futur1.
Laurence Blondiau, Sophie Vitry et Mercedes Vercouter
1 Deldime, R., & Vermeulen, S. (2008). Le développement psychologique de l’enfant. (7e édition). Bruxelles : Editions De Boeck.
Cette question trouve une réponse explicite dans l’intitulé « éveil géographique et historique » et une consécration dans la certification en fin d’école primaire puisque l’Histoire et la Géographie sont notées comme un seul domaine. La lecture des prescrits en matière de son enseignement rappellent les compétences transversales en jeu dans les disciplines d’éveil. Quant à la langue, pourrait-on en faire abstraction pour apprendre la géographie et ignorer qu’il existe un lexique consacré en cette matière ? Et pourrait-on ignorer les sciences dès lors que l’on aborderait les questions des énergies et du mieux vivre sur la planète Terre ?
C’est donc une question de bon sens que d’envisager, du moins dès l’école maternelle, l’enseignement de la géographie dans un contexte élargi, dans un projet où les disciplines en jeu seront clairement identifiées énoncées et progressivement présentées aux élèves. Toutefois lorsque de nouveaux concepts ou phénomènes géographiques sont abordés, des activités spécifiques devraient cibler les connaissances, les dimensions culturelles et les savoir-faire strictement en lien avec les notions à construire, avec des traces à organiser dans des référentiels évolutifs, sur des supports multiples.
Françoise Capacchi
Si l’on regarde ce qu’on nous dit dans les Socles, c’est très clair et les liens avec les autres domaines disciplinaires sont bien présents. La notion d’espace ne se construit pas uniquement dans le cadre des leçons de géographie, on la retrouve dans les compétences à construire en solides et figures, en éducation physique au niveau des habiletés gestuelles et motrices. De plus, des savoir-faire communs à l’éveil et la formation historique et géographique sont définis aux pages 76 à 79 des Socles. La lecture de ceux-ci montre très clairement que les liens avec les domaines du français et des mathématiques doivent être privilégiés.
Cependant, même si ce concept se construit au travers de plusieurs disciplines, certains de ses aspects sont particuliers et relèvent essentiellement du domaine de la géographie (cfr savoirs et savoir-faire spécifiques dans les Socles de compétences). Il faut donc faire les deux : travailler certains aspects en interdisciplinarité et d’autres de façon plus spécifique en éveil géographique.
Aline Debouny
C’est toujours l’intention de travail poursuivie par l’enseignant va déterminera pourquoi et comment les apprentissages prendront tout leur sens. A certains moments, l’approche globale et donc interdisciplinaire de l’apprentissage sera primordiale. A d’autres moments, de manière très claire, c’est un apprentissage spécifique du domaine de l’éveil géographique qui sera mené. L’un n’exclut jamais l’autre. Ces deux aspects sont à la fois complémentaires et indissociables. La présentation même des compétences des socles des domaines historique et géographique l’illustre. La question est de savoir pourquoi, quand et finalement comment on enseigne ce que l’on vise.
Frédéric Deplasse