Pratiquer une réelle évaluation formative, cela n’implique-t-il pas de revoir complètement l’organisation de la classe et des apprentissages ?
Jean-Marc Buret
Pas nécessairement, ou du moins pas de manière fondamentale et bien moins qu’avec des approches plus formatrices de l’évaluation. Au plus, avoir recours à l’évaluation formative induit que soient en mises en place au sein d’une même classe quelques situations où les différences d’apprentissages sont considérées. Si elle permet d’obtenir une idée des degrés de maîtrise de chacun des élèves, autant que ces informations permettent de constituer des groupes de besoin auxquels sont proposées des activités de travail adaptées. On entre donc ici dans le champ de la pédagogie différenciée, version simultanée. « La différenciation simultanée est le fait que, à un moment donné, dans une classe, les élèves s’adonnent à des activités diverses, précisément définies pour chacun d’eux et correspondant à leurs ressources et à leurs besoins ». (MEIRIEU, 1985, p. 135)
Ceci mis en place, la structure de la classe ne se voit pas pour autant révolutionnée tant restent possibles (et souhaitables !) les moments de travail collectif, les temps de leçon, les entraînements identiques pour tous, l’appui sur un manuel scolaire, … User de l’évaluation formative, c’est donner la chance aux élèves de mieux se préparer à l’évaluation finale (la sommative) et donc, pour soi en tant qu’enseignant, se donner les moyens que davantage d’élèves réussissent, que notre pédagogie s’apparente moins à un organe de la reproduction sociale. Pratiquer l’évaluation formative, c’est la réponse que l’on peut apporter à ceux qui accusent l’école de ne favoriser que les élèves riches ou doués, tout en permettant conjointement à ces derniers d’exploiter l’étendue de leurs capacités.
Sylvain Connac
Michel Derache
Il y aurait des conditions propices à la mise en place de pratiques d’évaluation formative : un climat de classe caractérisé par la confiance, le respect, la tolérance des différences, l’ouverture à la communication ainsi qu’à la collaboration (McMillan, 2000).
Mettre en place des pratiques d’évaluation formative pose un réel défi à tout enseignant. Black & Wiliam (1998) proposent des étapes d’implantation de changement de pratiques enseignantes pour améliorer les pratiques d’évaluation formative, soit les quatre étapes suivantes :
- l’apprentissage à partir d’exemples en salle de classe : les enseignants ont besoin d’exemples de pratiques gagnantes éprouvées et auxquelles ils peuvent s’identifier;
- la diffusion dans les pratiques : les enseignants doivent trouver leur propre façon d’incorporer les nouvelles façons de faire dans leurs pratiques habituelles;
- la réduction des obstacles : il est nécessaire de prendre le temps d’analyser les impacts négatifs que peuvent avoir certaines pratiques en place pour réduire ces effets;
- l’utilisation de la recherche : la lecture de recherches faites sur le sujet peut stimuler les changements de pratiques; par contre, les recherches restent trop souvent muettes sur les pratiques utilisées, la motivation et l’expérience des enseignants qui y ont pris part, la nature des tests utilisés pour mesurer le succès des expériences, etc. Ces données sont pourtant primordiales pour que les enseignants puissent faire ressortir des pistes claires pour leurs changements de pratiques.
Micheline-Joanne Durand
Sylvie Fontaine
Pratiquer des phases d’évaluation formative renvoie donc à une conception plus générale de la pédagogie mais aussi de la relation éducative.
Sylvain Grandserre
Olivier Maulini
Martine Meurant
Marie-Thérèse Zerbato-Poudou